Guerres et conflits parle d’Une nouvelle Guerre de Trente Ans ?

Curieuse (mais stimulante) brochure que voici. Ce petit volume (54 pages, 8 euros), rédigé par un bon connaisseur des questions de défense (enseignant à l’université de Lausanne et collaborateur de la Revue Militaire Suisse), nous entraîne dans un aller-retour assez virevoltant, de la crise financière dans l’Europe d’aujourd’hui aux combats en Franche-Comté entre 1634 et 1644 (“Un modèle de guerre cahotique”).

Pour l’auteur en effet, qui raisonne à l’échelle macro-historique (“celle des rythmes de la longue durée et des cycles de la conjoncture”), la crise financière actuelle “renvoie à une période de transition hégémonique, marquée par le chaos et l’incertitude”. Si l’hypothèse d’une conflagration générale en Europe n’est pas directement évoquée, la déstabilisation à laquelle on assiste “comporte un fort potentiel belligène” : or, ajoute-t-il en reprenant le titre de l’ouvrage célèbre de J.-B. Duroselle, Tout empire périra.

Bernard Wicht dresse le tableau, tel qu’il le voit, de la crise économique et (de l’impuissance) militaire des Etats européens. Il considère que l’on se dirige vers un effondrement des systèmes complexes, “l’U.E. représentant l’ultime avatar de la construction étatique moderne avec sa bureaucratie supra-étatique et son centralisme à l’échelle continentale”. L’atmosphère générale est donc plutôt sombre et pessimiste. Pas de “guerre classique” ici par contre (nos armées n’en sont selon lui pratiquement plus capables), mais “le développement inversement proportionnel d’une violence anarchique faite de brigandages et de règlements de compte.. [Le retour] à des formes plus moyenâgeuses de conflits : rezzous criminels et rapines de grande envergure”. Plus de “champ de bataille” au sens propre, mais “des raids-éclair à travers tout le pays progressant par ces grandes pénétrantes que sont les autoroutes … dans le contexte d’une activité sociale et économique s’efforçant de maintenir de conditions d’existence minimales pour la population” !

On peut bien sûr ne pas être d’accord avec cette analyse qui oscille entre les mercenaires de Wallenstein et Mad Max, mais, comme nous le disions en introduction, il est intellectuellement stimulant qu’un théoricien extrapole, s’éloigne des contingences convenues, imagine d’autres scénarios. Après tout, la prospective ne doit-elle pas laisser la place à une part d’imagination créatrice et la “prochaine guerre” n’est-elle pas toujours différente de ce que l’on envisageait au préalable ?

Bernard Wicht. Source : guerres-et-conflits.over-blog.com