Le Bréviaire tactique vu par Guerres-et-conflits

Vendredi 25 mai 2012

Pratique de l’action militaire

Bréviaire tactique

Colonel-divisionnaire Hans Frick

http://guerres-et-conflits.over-blog.com/

Ce volume de 130 pages au (trop) petit format (la police d’écriture choisie étant d’ailleurs minuscule, il n’est pas toujours aisé de la lire) présente bien des points d’intérêt.

Dans un texte introductif, Pierre Streit retrace l’évolution générale de la pensée militaire suisse depuis le XIXe siècle et remet le colonel-divisionnaire Hans Frick dans son contexte d’une armée de milice en partie influencée par le modèle allemand voisin. Jean-Jacques Langendorf ensuite complète cette présentation en revenant sur le détail de la vie professionnelle de l’auteur, devenu officier d’active quelques années avant la Première Guerre mondiale. Durant l’entre-deux-guerres, il commande en particulier un bataillon de fusiliers puis un régiment d’infanterie, mais effectue aussi un long séjour en Italie (où il considère que “le comportement des officiers laisse à désirer, la formation au combat est lamentable et l’instruction des soldats totalement insuffisante”) en 1928-1929 ; puis en Allemagne en 1937 : “Sur le plan militaire, son impression est très favorable. Mais pour le reste, il est foncièrement hostile au national-socialisme”. Il figure pendant la Seconde guerre mondiale parmi les principaux responsables de l’armée suisse, et se heurte d’ailleurs à son commandant en chef, le général Guisan ; il commande en particulier la 7e division et devient en novembre 1944 le chef de l’instruction de l’armée fédérale. C’est dans ce cadre qu’il rédige en 1943 ce Bréviaire tactique, publié en français chez Payot dès l’année suivante.

Avec des phrases brèves, le colonel-divisionnaire Frick s’efforce de présenter les “principes permanents” du commandement sur le terrain. Il ne s’agit donc pas d’un manuel, au sens où “on en a exclu tout ce qui, à un titre quelconque, dépendait de l’époque ou se rapportait à l’état actuel de la technique” et l’on ne trouvera pas ici de longs développements. L’ouvrage est divisé en treize brefs chapitres et s’ouvre sur cette affirmation à méditer : “Les lois de la guerre sont simples. Mais dans la réalité du combat, il arrive souvent qu’elles se contredisent. Une âme simple succombe devant l’accumulation de leurs exigences contradictoires, et seul un caractère d’airain, uni à une pensée claire et ferme, se trouve capable de discerner à laquelle il convient de donner la préférence dans chaque situation, ou encore jusqu’à quel point il convient d’établir un compromis entre elles”. Frick pose ici le principe de l’importance absolument essentielle à ses yeux de la formation en amont et des valeurs morales à cultiver. Au fil des différents chapitres, l’auteur développe en de très courts paragraphes, rédigés de façon affirmative (voire parfois impérative) toutes les notions relatives aux moyens du combat, à l’utilisation du terrain, à l’attaque et à la défense, à l’exploration et à la sûreté, à l’exploitation ou à la retraite. Plus original dans un ouvrage de ce type, le chapitre 12 s’intéresse à “La guérilla” : elle “n’emporte pas la décision ; elle peut, néanmoins, lui apporter une contribution importante. Elle exerce une influence durable sur le moral de l’ennemi, contrarie considérablement le commandement adverse et le ravitaillement de ses troupes, le contraint à des mesures de sécurité dispendieuses et à la dispersion de ses moyens”.

L’ouvrage se termine sur deux courts textes complémentaires. Alain Baeriswyl revient sur l’importance de “L’art de la tactique” contre “les effets pervers de la mode US” et François Villard évoque la figure et la carrière légionnaire du capitaine Quinclet, pour expliquer que ce Bréviaire tactique a bien été “éprouvé au feu de la vraie guerre”.

Au bilan, un petit volume qui tient dans la poche et dont le coût modeste (15 euros) justifie pleinement qu’il figure en bonne place dans toute bibliothèque bien tenue d’un officier ou d’un amateur des questions militaires.