vendredi 25 février 2011

Le Roi Léon



C’est à contrecœur, pour éviter de se voir débordé par les ultras du parti rexiste, que Léon Degrelle (1906-1994) signa son engagement dans l’armée allemande en juillet 1941. La victoire sur la Russie soviétique était certaine, on la pensait rapide, aussi était-il convenu qu’aucun Wallon ne serait envoyé en première ligne, mais que tous seraient affectés à la lutte anti partisans à l’arrière du front. À l’inverse des volontaires néerlandophones de la Vlaams Legioen, la Légion Wallonie ne sera d’ailleurs pas versée dans la Waffen-SS et c’est en tant que simple Schütze (soldat de 2e classe) que Degrelle, à qui le grade de lieutenant a été refusé, va endosser l’uniforme de la Heer. Seulement, les premiers combats ne ressemblent en rien à la marche triomphale annoncée et c’est un Léon Degrelle en état de choc qui doit être évacué du front. On croyait avoir tout lu sur « l’aventure degrellienne », couchée sur le papier par des écrivains aussi différents que Saint-Loup, Jean Mabire, Pol Vandromme ou Jonathan Littell*. Entièrement rédigé par Eddy de Bruyne, le nouveau hors-série du magazine Axe & Alliés nous livre le portrait d’un Léon Degrelle contrasté, à la fois arriviste généreux du sang de ses légionnaires (n’ambitionnait-il pas de commander un Corps d’Occident SS, qui aurait regroupé SS wallons, flamands et français ?) et soldat politique au courage proche de la témérité, nommé officier dès le mois de mai 1942.
Il y a de tout parmi les hommes qui s’enrôlent avec lui ce 31 juillet, des membres des Formations de Combat rexistes emmenés par Fernand Rouleau, son rival au sein du parti, des étudiants idéalistes, sinon désœuvrés, quelques Russes blancs exilés et même des Belges pronazis mais antidegrelliens. Comme lui, la plupart n’ont reçu aucune instruction militaire et de fait, en raison de ses insuffisances tactiques, jamais Degrelle ne dirigera les opérations sur le terrain. Les tensions entre rexistes et non rexistes, partisans de la scission de la Belgique et nationalistes belgicains, loin de s’interrompre au contact de l’ennemi, vont encore s’aggraver quand Degrelle obtient le transfert, effectif le 1er juin 1943, de la Légion Wallonie dans la Waffen-SS. À cette date, Degrelle a déjà troqué son patriotisme du temps de Rex pour le salut hitlérien et « l’idée bourguignonne » (toujours la référence au Téméraire).
La nouvelle SS-Sturmbrigade Wallonien de 1850 hommes connaît son heure de gloire à Tcherkassy à la fin de l’année 1943, non par une victoire, il ne s’agit plus de ça, mais en rompant l’encerclement de l’Armée rouge au prix d’énormes pertes. En décembre 1944, le Sturmbannführer (commandant) Degrelle voit sa demande de participer à l’offensive des Ardennes repoussée. Il s’absente du front, prend des contacts en Suisse. Le 28 avril 1945, le petit avion qui le transporte s’écrase sur une plage en Espagne. Quatre-cents soldats, tout ce qu’il reste de la désormais 28.SS Division Wallonien, se rendent aux Américains les jours suivants. Beaucoup considéreront après-guerre avoir été abandonnés par leur chef.

L. Schang

Axe & Alliés hors-série n°10, « Au-delà du mythe, La Légion Wallonie et Léon Degrelle », 7,50 euros

* Les SS de la Toison d’Or ; Léon Degrelle-Au Front de l’Est, 1941-1944 et Division Wallonie-Sur la Baltique, 1944-1945 ; Léon Degrelle au service d’Hitler ; Le sec et l’humide



« Je suis belge ! Il y a un peu de tout ici… Des Français, des Hongrois, des Yougos… Les survivants des divisions envoyées à l’Est… » (passage extrait de la bande dessinée Anton Six d’Arno et Bocquet, coédition L’Echo des Savanes/Albin Michel, 1987)

jeudi 10 février 2011

Jean Mabire, l’écrivain soldat


Avant l’écrivain militaire à succès, il y eut Jean Mabire le chasseur alpin, le lieutenant de réserve déjà trentenaire rappelé sous les drapeaux pour effectuer sa période dans le djebel algérien. Une arme pas comme les autres, à laquelle Mabire resta fidèle toute sa vie. Rien pourtant ne prédestinait l’écrivain normand à coiffer la célèbre tarte bleu-roi des chasseurs. Son attirance pour les troupes d’élite et autres hommes de guerre (deux titres de revue qu’il dirigea dans les années quatre-vingt) ne s’explique pas non plus sans cette connaissance intime qu’il acquit en Algérie de la guerre et de ceux qui la font. Chacun à sa manière, Philippe Héduy et Dominique Venner ont chanté le caractère initiatique de cette guerre qui refusait de dire son nom. Après deux numéros « Vagabondages » et « Patries charnelles », le Magazine des Amis de Jean Mabire a donc choisi de rendre hommage dans sa dernière livraison à l’écrivain et au soldat.
Le toujours dynamique Bernard Leveaux ouvre la marche avec un retour sur la série de livres que J. Mabire consacra aux unités parachutistes, son autre saga (pas moins de onze volumes) avec l’histoire de la Waffen-SS. Légion Wallonie, Les Panzers de la Garde noire, Mourir à Berlin… Éric Lefèvre, son documentariste, assurément aujourd’hui l’un des meilleurs connaisseurs du sujet en France, revient dans « L’Internationale SS » sur cette partie incontournable de l’œuvre de Mabire, à laquelle on aurait toutefois tort de la résumer. La biographie du maître − son passage au 12e BCA − n’est pas oubliée et l’on comprend, en lisant son article « Chasseur un jour… », pourquoi le capitaine (H) Louis-Christian Gautier dut se faire violence pour ne pas médire des troupes de montagne !
Le dossier est encore complété par la relecture, confiée à votre serviteur, du livre Les Samouraïs (« La plume et le sabre ») et les souvenirs très vivants des années de service en Rhodésie d’Yves Debay, rédacteur en chef de la revue Assaut (le bien titré « Mercenaire ! »).
À chaque parution, une publication qui se bonifie, sur le fond comme sur la forme.

L. Schang

Les Amis de Jean Mabire 15 route de Breuilles 17330 Bernay Saint-Martin (cotisation à partir de 15 euros)
Retrouvez aussi l’AAJM en ligne sur son site : http://amis.mabire.free.fr
 
 
 
 
 
 
 
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